TL;DR
- Entre 3000 et 5000 av. J.-C. environ, la taille efficace de la population mâle (Ne) sur le chromosome Y s’est effondrée d’un facteur ~5–20×, tandis que la Ne féminine continuait de croître, produisant le fameux « goulot d’étranglement du chromosome Y ». [^oai1]
- Les explications les mieux étayées impliquent des clans patrilinéaires, un biais reproductif masculin extrême et la compétition inter-clans — c’est‑à‑dire une sélection systématique sur les lignées mâles, et non un accident démographique aléatoire. [^oai2]
- Les méthodes démographiques standard supposent souvent la neutralité ; une sélection et une structuration omniprésentes peuvent faire ressembler la sélection à un simple effondrement de taille, et fausser la datation de son origine. [^oai3]
- Du point de vue du gène, l’esprit de l’Âge du Bronze a été sculpté dans un monde où la plupart des hommes ne laissaient aucun descendant patrilinéaire, et où une minorité de mâles alignés sur des clans, violents et obsédés par le statut dominaient l’arbre du Y. [^oai4]
- Cette purge de la lignée mâle ne signifie pas que « les hommes ont disparu » biologiquement — l’ascendance autosomique est préservée — mais elle marque un tournant net dans la manière dont la psychologie masculine, la parenté et le pouvoir ont été câblés dans l’histoire humaine.
« Croix contre croix, boucliers contre boucliers s’entrechoquent… et la terre se noircit de sang. »
— L’Iliade, trad. (choisissez votre préférée), rejouant une querelle de paternité de l’Âge du Bronze
1. L’étrange affaire des hommes disparus#
Si l’on ne suit que la lignée paternelle — de père en fils, de fils en fils — l’espèce humaine fait quelque chose de très étrange entre le Néolithique et l’Âge du Bronze.
À l’échelle du génome, les tailles efficaces de population augmentent tout au long de l’Holocène à mesure que l’agriculture, les villages, puis les villes se répandent. Mais sur le chromosome Y, la diversité s’effondre : plusieurs études convergent vers une chute de Ne mâle d’un ordre de grandeur ou plus entre environ 3000 et 5000 av. J.-C., suivie d’une ré‑expansion explosive. [^oai1]
L’ADN mitochondrial (ADNmt) et les autosomes ne montrent pas de crash correspondant. La Ne féminine continue de grimper, et la diversité autosomique suit globalement la croissance de la population. La lecture la plus simple :
- Femmes : beaucoup de lignées survivent et s’étendent.
- Hommes : la plupart des patrilignées sont éliminées ; une minorité s’étend massivement.
C’est ce qu’on appelle le goulot d’étranglement du chromosome Y. Son ampleur est extrême : les rapports estimés de Ne féminine à Ne masculine dans cette fenêtre peuvent atteindre ~10–20 :1. [^oai2]
Le point crucial : ce n’est pas une histoire de sex‑ratio biologique — il n’y a pas soudainement eu 15 femmes pour un homme. Il s’agit de savoir qui, parmi les hommes, a pu devenir un ancêtre patrilinéaire.
Du point de vue du chromosome Y, l’Âge du Bronze ressemble à une purge.
2. Ce que disent réellement les données#
Ancrons le récit dans les suspects habituels : Karmin et al. (2015), Poznik et al. (2016), et des travaux de modélisation ultérieurs.
Karmin et al. ont séquencé les chromosomes Y de 456 hommes issus de populations diverses et reconstruit la taille efficace de population au cours du temps. Ils ont trouvé :
- Une chute brutale de Ne‑Y dans de nombreuses populations de l’Ancien Monde entre ~4–8 ka.
- Aucun effondrement comparable dans l’ADNmt, qui montre au contraire une expansion continue. [^oai1]
Poznik et al. ont ensuite utilisé 1244 chromosomes Y du 1000 Genomes Project et des courbes de type skyline similaires, confirmant des bouffées et effondrements ponctués dans la démographie mâle, y compris le goulot d’étranglement post‑néolithique. [^oai4]
Parallèlement, les études sur la démographie biaisée par le sexe montrent que les marqueurs uniparentaux (Y vs ADNmt) divergent souvent en diversité et en temps de coalescence, ce qui est compatible avec des schémas d’accouplement et de migration structurés culturellement. [^oai2]
Un aperçu compact#
| Étude / Source | Signal principal sur le Y | Contraste avec ADNmt / autosomes | Conclusion pour le goulot d’étranglement |
|---|---|---|---|
| Karmin et al. 2015 (Genome Res.) [^oai1] | Effondrement global de Ne‑Y ~4–8 ka, chute ~>5× | ADNmt en croissance ; autosomes compatibles avec une expansion | Fort goulot d’étranglement spécifique aux mâles, calé sur la culture. |
| Poznik et al. 2016 (Nat. Genet.) [^oai4] | « Bouffées ponctuées » dans la démographie Y ; chute holocène marquée | Pas de crash correspondant dans les autosomes | Goulots d’étranglement et expansions masculins récurrents. |
| Zeng et al. 2018 (Nat. Commun.) [^oai5] | Simulations reproduisant le goulot Y via clans patrilinéaires + guerre | ADNmt en croissance ; Ne féminine stable/en hausse | Auto‑stop culturel : compétition entre groupes patrilinéaires. |
| Guyon et al. 2024 (Nat. Commun.) | Goulot Y reproduit par des systèmes segmentaires patrilinéaires pacifiques | Lignées féminines en expansion | La seule structure sociale, même sans guerre explicite, suffit à produire l’effondrement. |
| Synthèses Néolithique/Âge du Bronze (encyclopédiques) | Rapport Ne femelle : Ne mâle jusqu’à ~17 :1 au milieu de l’Holocène | — | Taille efficace extrêmement biaisée par le sexe, impliquant une énorme variance du succès reproducteur masculin. |
Même les synthèses de niveau Wikipédia relient désormais explicitement le goulot d’étranglement à la diffusion de l’agriculture, à l’héritage patrilinéaire et à un succès reproducteur masculin fortement biaisé.
L’énigme n’est pas de savoir si quelque chose de dramatique est arrivé aux lignées mâles. C’est quel type de force évolutive en est responsable.
3. Dérive, démographie ou sélection ?#
Trois grandes explications sont généralement avancées :
- Démographie neutre : un effondrement global de la population mâle (peste, climat, etc.).
- Structure culturelle avec génétique neutre : clans patrilinéaires, mais sans différences systématiques de fitness entre lignées Y ; dérive dans une population structurée.
- Sélection gène–culture : clans patrilinéaires plus différences persistantes de succès reproducteur entre lignées mâles ; la survie de certains haplogroupes Y n’est pas aléatoire.
Le tableau empirique exclut la version la plus simple de (1). Un crash global réel, assez important pour réduire Ne‑Y de 10–20×, devrait laisser des empreintes dans les autosomes et l’ADNmt ; elles ne sont pas là. [^oai1]
Cela nous pousse vers (2) et (3), qui ne sont pas nettement séparables. Une fois que l’on adopte le point de vue du gène, une « structure culturelle neutre » qui élimine à répétition certains clans et en récompense d’autres est de la sélection, même si les causes immédiates sont sociales.
Auto‑stop culturel : la version violente#
Zeng, Aw & Feldman (2018) modélisent l’« auto‑stop culturel » dans des groupes de parenté patrilinéaires. Imaginez :
- Des villages composés de clans patrilinéaires (des hommes partageant un haplogroupe Y).
- Une compétition violente entre clans pour le territoire et les partenaires.
- Les clans victorieux s’étendent, se scindent et propagent leur Y ; les clans vaincus perdent leurs mâles et disparaissent parfois.
Leurs simulations prospectives montrent que cette structure à elle seule peut reproduire un fort goulot d’étranglement spécifique aux mâles, avec une chute de Ne‑Y d’un ordre de grandeur tandis que l’ADNmt continue de s’étendre. [^oai5]
Le motif génétique suit la fortune de bandes de guerre définies culturellement.
Systèmes segmentaires patrilinéaires : le modèle « pacifique »#
Guyon et al. (2024) proposent un autre type de modèle. Ils construisent des systèmes segmentaires patrilinéaires — des lignées qui se divisent et forment de nouveaux segments à mesure qu’elles croissent — à partir de données ethnographiques, et les laissent évoluer sans supposer de violence massive.
Ingrédients clés :
- Résidence patrilocale et descendance patrilinéaire.
- Fission des lignées lorsqu’elles grandissent.
- Succès reproducteur variable entre groupes de descendance (certaines lignées prospèrent, d’autres stagnent).
Dans ces conditions, Ne‑Y chute tout de même, même lorsque Ne féminine augmente et que la violence est minimale. La variance au niveau des lignées et la fission suffisent.
Dans les deux modèles, cependant, l’histoire du point de vue du gène est la même :
Certaines patrilignées porteuses du Y ont systématiquement fondé des groupes de descendance plus prospères, et leurs descendants mâles sont venus à dominer l’arbre du Y.
C’est de la sélection. Vous pouvez choisir de l’appeler « culturelle ». Le Y s’en moque.
4. Pourquoi cela doit fondamentalement être de la sélection#
On n’obtient pas un écart de 10–20× entre Ne mâle et Ne femelle avec une monogamie polie et des fluctuations aléatoires.
Les revues sur la démographie spécifique au sexe exposent les mathématiques : pour réduire Ne‑Y à ce point tandis que l’ADNmt s’étend, il faut une variance extrême du succès reproducteur masculin, bien au‑delà de ce que l’on observe dans des modèles de dérive simples. [^oai2]
La sélection naturelle sur le Y lui‑même est un peu particulière — il est en grande partie non recombiné et pauvre en gènes — mais les preuves s’accumulent pour une sélection façonnant la distribution des haplogroupes Y, y compris des signaux de sélection positive et purificatrice sur des lignées Y dans différentes régions. [^oai6]
Ajoutez à cela :
- La synchronisation globale avec les transitions post‑néolithiques. [^oai1]
- L’abondante évidence archéologique d’une stratification sociale croissante, d’élites héréditaires et de guerres à grande échelle au Néolithique final et à l’Âge du Bronze.
Et l’image la plus parcimonieuse est :
Les institutions culturelles ont créé un paysage de fitness où certains types d’hommes — et leurs clans — se reproduisaient bien plus que d’autres.
C’est de la sélection, même si la chaîne causale passe par les chars, la dot et « qui contrôle les troupeaux » plutôt que par une mutation unique dans un gène codant pour une protéine.
5. Comment la démographie standard masque la sélection (et la date mal)#
Voici le rebondissement : la plupart des inférences démographiques classiques supposent la neutralité.
Les méthodes coalescentes reconstruisent typiquement l’histoire de la taille de population en supposant que les motifs de variation à l’échelle du génome reflètent la dérive dans une population panmictique. La sélection, la sélection de fond et la structure sont traitées comme du bruit à filtrer, non comme des moteurs centraux. [^oai7]
Une décennie de travaux a montré à quel point cela peut mal tourner :
- La sélection de fond et la sélection liée peuvent faire ressembler des populations stables à des populations ayant subi des goulots d’étranglement ou des expansions. [^oai3]
- La sélection purificatrice peut biaiser les schémas de croissance inférés même lorsque les sites fonctionnels sont masqués. [^oai5]
- La structure de population elle‑même peut imiter des changements de taille de population si l’on impose un modèle homogène à une réalité hétérogène. [^oai8]
Pour notre propos, le point clé est conceptuel :
Si vous ajustez un modèle démographique neutre à un monde où la fitness masculine est violemment biaisée par la culture et la sélection, votre « goulot d’étranglement » sera un résumé déformé d’un processus bien plus désordonné.
Le goulot d’étranglement du chromosome Y que nous reconstruisons autour de 4–5 ka peut être l’aboutissement d’un régime de sélection plus long ayant commencé plus tôt — peut‑être dès les premiers chefferies néolithiques et lignées segmentaires se formant il y a 8–10 ka — mais qui se contracte en une chute abrupte dans les courbes skyline.
L’esprit masculin de l’Âge du Bronze, en d’autres termes, peut être l’expression tardive de pressions évolutives qui ont débuté lorsque nous avons pour la première fois lié terres, troupeaux et femmes aux patrilignées.
6. Ce qui disparaît dans un goulot Y (et ce qui ne disparaît pas)#
Avant de fantasmer sur des armées de seigneurs de guerre néolithiques disparus, une mise au point.
Quand une lignée Y « s’éteint », cela ne signifie pas que tous les hommes de ce clan ont disparu du génome autosomique. Leurs filles peuvent toujours transmettre des variants autosomiques ; leurs petits‑fils par les filles portent leurs autosomes, mais pas leur Y.
Le goulot d’étranglement concerne spécifiquement la continuité patrilinéaire.
L’histoire n’est donc pas que « la plupart des hommes sont morts sans enfants ». Plutôt :
- Beaucoup d’hommes n’ont eu que des filles ou des lignées mâles courtes qui se sont éteintes.
- Un sous‑ensemble d’hommes se trouvait au centre d’arbres patrilinéaires en expansion qui sont venus dominer le paysage du Y.
Si votre ancêtre de l’Âge du Bronze est « absent » de l’arbre du Y, il vit probablement en vous — mais pas comme partie de l’architecture de marque patrilinéaire.
Pour comprendre l’évolution de la psychologie masculine, toutefois, le succès patrilinéaire importe. Culture et gènes ont conspiré pour récompenser certaines stratégies masculines — celles qui maintenaient votre Y en jeu.
7. L’esprit de l’Âge du Bronze comme produit de la sélection patrilinéaire#
Quel type de psychologie masculine prospère dans un tel environnement ?
Une littérature émergente en psychologie évolutionniste et en évolution culturelle relie explicitement sélection sexuelle, quête de statut et institutions comme les systèmes segmentaires patrilinéaires. Certains travaux font désormais référence directement au goulot d’étranglement du chromosome Y. [^oai9]
En abstraisant ces travaux et les modèles génétiques, on obtient un tableau étonnamment cohérent :
- Compétition mâle–mâle extrême. Que ce soit par la guerre, le raid ou l’accumulation pacifique, le succès reproducteur masculin est étroitement couplé au rang au sein de la hiérarchie patrilinéaire.
- Obsession coalitionnelle. Votre principal projet évolutif n’est pas « être un bon humain » mais « faire avancer notre patrilignée ». Cela implique loyauté envers les parents mâles, méfiance envers les étrangers et volonté de se sacrifier pour le clan.
- Fixation sur l’héritage. Terres, bétail et femmes sont canalisés le long des lignes masculines ; les disputes sur la paternité et la succession sont des événements existentiels pour les lignées.
- Le statut comme survie. Descendre d’un échelon sur l’échelle risque de transformer vos descendants en bruit de fond génétique — des filles mariées dans d’autres clans, des fils évincés.
Du point de vue du Y, les gagnants sont les hommes qui :
- Sont efficaces dans la violence coalitionnelle ou l’intimidation.
- Naviguent assez bien la politique intra‑clanique pour ne pas être éliminés par les leurs.
- Produisent des fils qui héritent à la fois des ressources et de la position dans le clan.
C’est exactement l’écologie psychologique que suggère le registre archéologique du Néolithique final et de l’Âge du Bronze : établissements fortifiés, tombes riches en armes, élites guerrières héréditaires et réseaux de raids à longue distance.
Le goulot d’étranglement du chromosome Y est la manière dont la génétique dit : oui, cela a laissé une trace.
8. Le goulot d’étranglement était‑il purement « pacifique » ?#
Le modèle de système segmentaire de Guyon et al. est souvent présenté dans la presse comme « une explication pacifique du goulot d’étranglement ».
Et, au sens étroit, ils ont raison : on peut obtenir une forte chute de Ne‑Y sans supposer de massacres constants. La fission des lignées et la reproduction différentielle font beaucoup.
Mais « pacifique » signifie ici « pas de paramètre explicite de génocide dans la simulation ». En réalité ethnographique, les systèmes segmentaires ne sont pas des utopies pacifistes ; ils organisent vendetta, raids et punitions collectives le long des lignes de descendance masculine.
Je traduirais donc leur résultat de manière plus neutre :
Une fois que des systèmes segmentaires patrilinéaires existent, vous n’avez pas besoin d’hypothèses supplémentaires de violence apocalyptique globale pour obtenir un goulot Y. Le fonctionnement de base du système est déjà suffisamment dur.
C’est compatible avec le modèle fortement violent de Zeng et al. ; ils mettent l’accent sur des aspects différents d’une même dynamique sous‑jacente. [^oai5]
Dans tous les cas, le monde qui a engendré l’esprit de l’Âge du Bronze était un monde où naître dans la mauvaise patrilignée équivalait à une lente condamnation génétique.
9. À quel point cela a‑t‑il commencé tôt ?#
Les courbes skyline génétiques placent le nadir du goulot Y autour de 4–5 ka, mais si l’on s’arrête là, on confond le crash avec l’ensemble de l’accident.
Étant donné :
- La diffusion bien documentée de l’agriculture et des premières chefferies à partir de ~10 ka.
- Les transitions archéologiques vers la propriété, la hiérarchie et les échanges à longue distance entre le 8e et le 5e millénaire av. J.-C.
- La tendance connue de la sélection et de la structure à biaiser l’inférence démographique neutre. [^oai3]
Il est plausible que :
- La sélection initiale sur les lignées mâles ait commencé avec les premières patrilignées néolithiques, lorsque terres et troupeaux ont commencé à être hérités en ligne masculine.
- Ce processus se soit intensifié à mesure que les populations se densifiaient, que des élites émergeaient et que les conflits inter‑groupes prenaient de l’ampleur.
- Au moment où l’on atteint l’Âge du Bronze à plein régime — chars, oppida fortifiés, routes caravanières — l’arbre du Y sous‑jacent était déjà élagué ; ce que nous voyons comme un « goulot d’étranglement » est le point où cet élagage atteint un seuil de basculement coalescent.
En d’autres termes, le goulot d’étranglement du Y n’est pas un événement unique mais l’ombre génétique d’une transition multimillénaire vers un monde patrilinéaire et structuré par la guerre.
10. Où cela laisse‑t‑il l’esprit masculin moderne ?#
Nous ne sommes pas des chefs de l’Âge du Bronze. Mais nous fonctionnons, à première approximation, sur un matériel ajusté dans ce monde‑là.
Les gènes portés sur le Y ne sont qu’une petite partie de l’histoire — la plupart des variations pertinentes pour le comportement sont autosomiques ou liées à l’X — mais le processus qui a produit le goulot Y implique une sélection étendue sur le comportement masculin, culturelle et génétique :
- Les hommes incapables de naviguer la politique patrilinéaire ont eu moins de descendants patrilinéaires.
- Les clans qui échouaient à la guerre, à l’alliance ou à la stratégie pastorale disparaissaient de l’arbre du Y.
- Les institutions qui récompensaient certaines normes masculines (honneur, vengeance, prouesse martiale) structuraient qui se reproduisait.
Les sociétés modernes tentent de canaliser ces impulsions vers les startups et les compétitions sportives. Mais le fait profond demeure : pendant plusieurs millénaires, être le mauvais type d’homme équivalait, à long terme, à n’avoir jamais existé dans le registre généalogique mâle.
Voilà l’esprit de l’Âge du Bronze : non pas une âme guerrière romantique, mais un filtre à l’échelle de la population qui a rendu certains schémas de cognition et de culture masculines très communs, et d’autres pratiquement impossibles.
FAQ#
Q1. Le goulot d’étranglement du chromosome Y signifie‑t‑il que la plupart des hommes n’avaient pas d’enfants ?
R. Non. Cela signifie que la plupart des lignées mâles se sont finalement éteintes — souvent via des lignées de filles ou des lignées mâles de courte durée — tandis qu’une minorité de patrilignées s’est étendue de manière spectaculaire, dominant l’arbre Y moderne.
Q2. Le goulot d’étranglement pourrait‑il n’être qu’un artefact méthodologique ?
R. Les choix méthodologiques comptent, et la sélection et la structure peuvent biaiser l’inférence démographique, mais plusieurs jeux de données indépendants et approches de modélisation convergent vers un déclin réel et substantiel de Ne spécifique aux mâles. [^oai1]
Q3. Pourquoi l’ADNmt ne montre‑t‑il pas le même goulot d’étranglement ?
R. Parce que le succès reproducteur féminin est moins étroitement lié à la hiérarchie patrilinéaire ; les femmes peuvent circuler entre groupes, et les matrilignées ne subissent pas les mêmes extinctions au niveau des groupes de descendance que les lignées masculines. [^oai2]
Q4. Cela prouve‑t‑il une sélection sur des « gènes guerriers » spécifiques sur le Y ?
R. Pas spécifiquement ; le Y contient peu de gènes. Le goulot d’étranglement reflète surtout la sélection sur des patrilignées définies culturellement et sur des arrière‑plans autosomiques ; le Y est un traceur commode de la manière dont ces clans ont émergé et chuté. [^oai6]
Q5. Comment cela se rattache‑t‑il à l’évolution humaine au sens large ?
R. Cela montre que des institutions culturelles relativement récentes — clans patrilinéaires, guerre, héritage — peuvent remodeler drastiquement les généalogies en quelques millénaires, et ont probablement eu de forts effets de rétroaction sur la psychologie masculine, les normes sociales et les types d’esprits qui paraissaient « normaux » à l’Âge du Bronze.
Sources#
- Karmin, M. et al. “A recent bottleneck of Y chromosome diversity coincides with a global change in culture.” Genome Research 25(4) (2015) : 459–466. [^oai1]
- Poznik, G. D. et al. “Punctuated bursts in human male demography inferred from 1,244 worldwide Y-chromosome sequences.” Nature Genetics 48(6) (2016) : 593–599. [^oai4]
- Zeng, T. C., Aw, A. J., & Feldman, M. W. “Cultural hitchhiking and competition between patrilineal kin groups explain the post-Neolithic Y-chromosome bottleneck.” Nature Communications 9 (2018) : 2077. [^oai5]
- Guyon, L. et al. “Patrilineal segmentary systems provide a peaceful explanation for the post-Neolithic Y-chromosome bottleneck.” Nature Communications 15 (2024) : 3243.
- Heyer, E. et al. “Sex‐specific demographic behaviours that shape human genomic variation.” Molecular Ecology 21(3) (2012) : 597–612. [^oai2]
- Jobling, M. A. “Human Y-chromosome variation in the genome-sequencing era.” (Revue).
- Ewing, G. B. & Jensen, J. D. “The consequences of not accounting for background selection in demographic inference.” Molecular Ecology 25(1) (2016) : 135–141. [^oai3]
- Pouyet, F. et al. “Background selection and biased gene conversion affect more than 95% of the human genome and bias demographic inferences.” eLife 7 (2018) : e36317. [^oai10]
- Johri, P. et al. “The impact of purifying and background selection on the inference of population history: problems and prospects.” Molecular Biology and Evolution 38(7) (2021) : 2986–3003. [^oai5]
- Marchi, N. & Excoffier, L. “Demographic inference.” Current Biology 31(12) (2021) : R726–R732. [^oai11]
- Wang, C. C. et al. “Natural selection on human Y chromosomes.” prépublication (2013). [^oai6]
- Snyder, B. “Sexual Selection Creates Status-Seeking Males and Unsustainable Economic Growth.” Evolutionary Psychological Science (2025). [^oai9]
- « Neolithic. » Article de synthèse avec résumé génétique et culturel.
[^oai1] : Onlinelibrary [^oai2] : Cell [^oai3] : Jjensenlab [^oai4] : ResearchGate [^oai5] : Academic [^oai6] : Jjensenlab [^oai7] : Wikipedia [^oai8] : Peercommunityjournal [^oai9] : Nature [^oai10] : Science [^oai11] : ScienceDirect