TL;DR

  • La catabase féminine (Inanna, Perséphone, Xquic) installe des règles au seuil — calendriers de substitution, modulation de la fertilité et aliments qui lient par serment — tandis que les dieux mourants masculins (Dumuzi, Adonis, Osiris, Telepinu) deviennent de la matière pour des rites saisonniers (semence, pousse, lamentation). ETCSL Inanna’s Descent ; Homeric Hymn to Demeter ; Christenson, Popol Vuh.
  • Les trajectoires de l’agence féminine : (a) fixer les termes de l’échange (Inanna divise l’année, Déméter arrête les récoltes), (b) rites agraires dirigés par des femmes (Thesmophories), et (c) ruse juridico-technique autour du sang/de la semence (le « faux cœur » de Xquic). ETCSL, lignes 404–410 ; Mylonas sur Éleusis ; Tedlock note 205.
  • Les dieux mourants masculins se cartographient sur des simulacres de plantation/fané : « jardins » d’Adonis, momies de blé d’Osiris, disparition de Telepinu comme sécheresse — résolue par des spécialistes rituels (souvent incluant des femmes) et un retour saisonnier. Platon Phèdre 276b ; Met Museum sur les « lits d’Osiris » de Khoiak ; UT Austin LRC sur Telepinu.
  • La charnière saisonnière est genrée : quand elle descend, elle fixe le contrat (partage du temps, tabous, rites d’approche) ; quand il meurt/disparaît, son corps tient lieu de récolte (pousse, lamentation, fragmentation).
  • Concrètement : repérer l’agence féminine là où les mythes légifèrent les seuils (grenade, sève de calebasse), autorisent les rites féminins (Thesmophories) et encodent des permutations calendaires (Inanna↔Geshtinanna). Hymn to Demeter ; Ruscillo sur la pratique des Thesmophories ; ETCSL 1.4.1.

« Ce qui se fane se relèvera par un accord. »
— Glose rituelle non attribuée, reconstruite à partir de mythes saisonniers (aphorisme de travail)


Qu’est-ce qui change quand la descendante est une femme ?#

Thèse. Les descentes féminines (ou l’origine/évasion depuis l’inframonde, dans le cas de Xquic) concernent la juridiction sur les seuils. La déesse/jeune fille ne fait pas que mourir et revenir ; elle stipule des conditions — qui la remplace, pour combien de temps, et sous quel serment alimentaire — reconfigurant ainsi le calendrier agraire. En revanche, les dieux mourants masculins deviennent des substituts végétaux dont la mort/absence est rituellement “cultivée” par la communauté.

  • Inanna ne revient qu’en nommant un substitut ; elle saisit Dumuzi et — point crucial — divise l’année entre lui et sa sœur Geshtinanna (c’est explicite dans la clausule sumérienne : « toi pour la moitié de l’année et ta sœur pour l’autre moitié de l’année »). C’est une loi au portail, fixée par le choix d’une femme.[^half] ETCSL, Inana’s Descent, 404–410.
  • Perséphone mange la grenade et lie ainsi une résidence cyclique aux Enfers ; Déméter arme la famine jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé — puis un culte fondateur (Éleusis) ritualise ce compromis.Homeric Hymn to Demeter ; synthèse dans Mylonas.
  • Xquic (« Lune de Sang » du Popol Vuh) échappe à l’exécution en substituant de la résine d’arbre à son cœur et en remontant à la surface ; elle prouve la justesse de sa « semence » par un signe de maïs devant Xmucane. C’est une technologie juridique féminine autour du sang/de la semence à la frontière de l’inframonde.Christenson, Popol Vuh (éd. Mesoweb) ; détail de la résine dans Tedlock, note 205.

À quoi servent les dieux mourants masculins#


Matrice comparative (mécanique mythique → rite → saison)#

FigureCultureAction centraleQui fixe les termes ?Corrélat rituelCharnière saisonnièreTexte / source principal
InannaSumérienneDescente volontaire ; tuée ; ranimée ; nomme un substitutInanna (choisit Dumuzi ; divise l’année avec Geshtinanna)Lamentation → substitutionBascule semestrielleETCSL t.1.4.1, 404–410
Perséphone (avec Déméter)GrecqueEnlèvement ; serment de grenade ; grève de la famine de Déméter ; culte fondéDéméter/Perséphone (tabou alimentaire qui lie)Mystères d’Éleusis ; rites agraires fémininsCycle hiver/printempsHymn to Demeter (CHS) ; Mylonas
Xquic (Lune de Sang)Maya k’iche’Jeune fille de l’inframonde qui ascend via un « cœur » de résine ; signe de maïsXquic (ruse, preuve)Légitimation maternelle ; présage de maïsLégitimation de la plantationChristenson, Popol Vuh ; Tedlock note 205
DumuziSumérienneDivinité mourante/alternanteInanna/Geshtinanna tranchentLamentations ; alternanceMoitiés sèche/verteETCSL t.1.4.1 ; t.1.4.1.1
AdonisGrecqueJeune homme beau qui meurtLa communauté ritualiseJardins des Adonies par les femmesFlétrissement estivalPlaton Phèdre 276b ; Théocrite Id. 15
OsirisÉgyptienneDémembré ; réassemblé ; souverain des mortsIsis officie ; culte d’ÉtatKhoiak momies de bléSemis/pousseMet Museum, Khoiak
TelepinuHittiteDisparaît ; le monde échoue ; l’abeille le réveille ; un rite l’apaiseDieux/prêtres ; KamrušepaRite saisonnier d’apaisementSécheresse/retourUT LRC ; analyse Brill

Là où l’agence féminine laisse des empreintes rituelles#

1) Droit du seuil & substitution.
Les descentes féminines génèrent des règles d’échange. Le verdict d’Inanna divise l’année entre Dumuzi et Geshtinanna — une loi explicitement calendaire fixée par une déesse.ETCSL t.1.4.1, 404–410. Le retrait du grain par Déméter force un règlement politique qui ancre Éleusis.Hymn to Demeter ; Mylonas.

2) Autorité agraire des femmes.
Les Thesmophories, rite automnal réservé aux femmes en l’honneur de Déméter/Perséphone, mettent en scène semence + pourriture + retour avec des dépôts et récupérations de porcelets (scholies à Lucien ; Clément) qui sont gérés par des femmes et liés aux semailles.Ruscillo, Thesmophoriazusai: Mytilenean Women…. L’étiologie de l’Hymne canalise la même économie mère–fille dans le culte public.Hymn to Demeter.

3) Serments alimentaires & tests de semence.
La grenade de Perséphone lie la saisonnalité ; le « cœur » de résine et le signe de maïs de Xquic manipulent la jurisprudence de l’inframonde concernant le sang et la lignée.Hymn to Demeter ; Tedlock note 205 ; Christenson.

4) Contraste : les corps masculins deviennent des médias agraires.
Les pousses en pot d’Adonis (proverbe chez Platon ; mime festif chez Théocrite) dramatisent la mort par chaleur de la végétation dans un rite dirigé par des femmes.Platon 276b ; Théocrite Id. 15. Les momies de grain d’Osiris ritualisent la résurrection comme germination.Met. L’colère/absence de Telepinu est résolue par des spécialistes rituels, non par un compromis juridique féminin.UT LRC.

Fonctions qui se cartographient nettement sur l’agence féminine#

FonctionCasDispositif rituelQui dirige / appliqueEffet saisonnier
Règle d’échange au portailInanna→Dumuzi/GeshtinannaPartage verbal de l’annéeDéesse qui décrèteAlternance biannuelle
Modulation de la fertilitéDéméterGrève de la famine jusqu’au pacteMère qui contrôle le grainHivernage / retour
Rite de semailles réservé aux femmesDéméter/PerséphoneThesmophories (porcelets → semence)Femmes (antlêtriai, etc.)Semailles d’automne bénies
Serment alimentaire / test de semencePerséphone ; XquicGrenade ; cœur de résine / signe de maïsActrices fémininesContrainte calendaire ; légitimation lignagère

Notes de méthode (et incertitudes)#

  • Ne pas aplatir les cultures dans une bouillie frasérienne. Le mythe de Telepinu fonctionne aussi comme modèle de rituel d’État, et non comme un simple récit de « dieu de la végétation » ; néanmoins, sa dynamique saisonnière de sécheresse/retour fait écho aux cycles de végétation méditerranéens.UT LRC ; Brill 2019.
  • L’alternance semestrielle dans la Descente d’Inanna est parfois omise dans les résumés ; la traduction ETCSL la conserve, ce qui règle la question textuellement.ETCSL 404–410.

FAQ#

Q1. Le mythe de Perséphone porte-t-il principalement sur les saisons ou sur l’initiation ?
R. Les deux. L’Hymne encode une famine/retour saisonnier et une étiologie pour Éleusis, où les initiés attendaient un meilleur sort ; ces dimensions sont intriquées plutôt qu’exclusives.Hymn to Demeter ; Mylonas.

Q2. Où l’agence féminine est-elle le plus visible rituellement ?
R. Dans les rites agraires dirigés par des femmes (Thesmophories) et dans le droit du seuil (partage d’Inanna ; grève de Déméter ; substitutions juridiques de Xquic), chacun liant le temps ou la semence par l’acte d’une femme.ETCSL t.1.4.1 ; Ruscillo.

Q3. Les jardins d’Adonis sont-ils vraiment « réservés aux femmes » ?
R. Les témoignages portent surtout sur la célébration par des femmes (Adonies athéniennes ; femmes de Théocrite à la fête) et sur les pousses en pot proverbiales citées par Platon ; la pratique locale variait.Théocrite Id. 15 ; Platon 276b.

Q4. Xquic « descend-elle » ?
R. Elle commence dans l’inframonde et ascend, mais la logique du seuil est la même : une femme négocie la frontière par des substitutions de sang/semence puis par une maternité fondatrice (les Jumeaux Héros). Christenson.


Notes#


Sources#


La catabase féminine est une jurisprudence à la frontière cosmique ; les dieux mourants masculins sont de l’agronomie en habit mythique. Si vous construisez des modèles, codez pour qui a le pouvoir de fixer la règle au portail — c’est là que la bascule saisonnière s’opère réellement.